Le 9 juin 2023, la France était le premier pays européen à adopter une loi visant à encadrer l’influence commerciale. Pour autant, la Commission Européenne signalait peu de temps après la possible contrariété de cette législation au droit européen, amenant la France à faire évoluer sa règlementation en la matière.
Depuis 2023, la France a renforcé sa législation en matière d’influence commerciale.
Jusqu’alors, aucun texte ne réglementait expressément le domaine de l’influence et de la création de contenu. De nombreuses dérives ont motivé le législateur français à encadrer les différentes pratiques des acteurs du secteur.
C’est dans ce contexte que la Loi du 9 juin 2023 n° 2023-451 « visant à encadrer l’influence commerciale et à lutter contre les dérives des influenceurs sur les réseaux sociaux » a été adoptée autour de 3 grands axes :
- la création d’une définition légale du statut d’influenceur et de son agent et l’encadrement de leur activité ;
- une responsabilisation des influenceurs, des annonceurs et des plateformes ;
- l’encadrement de certaines publicités sur les réseaux sociaux et leur interdiction dans certains cas.
Retentissement de la loi sur l’Influence Commerciale en Europe
Les institutions de l’Union Européenne se sont elles aussi emparées de ce sujet d’actualité. Ainsi, la Commission a -t- elle lancé en 2023 une plateforme d’informations destinée aux influenceurs, et initiée plusieurs enquêtes en la matière, en étroite collaboration avec les autorités nationales.
C’est dans ce cadre qu’un groupe de travail « Audiovisuel et médias » du Conseil de l’Union Européenne dédié à ce sujet a été mis en place pour à mettre à jour la règlementation européenne pour prendre en compte l’influence commerciale dont les conclusions pourront servir de base à une règlementation concrète.
Par ailleurs, la Commission a plus largement déjà laissé envisager une révision globale de la législation européenne existante en matière de protection des consommateurs à mettre en place sous la forme d’un règlement sur l’équité numérique.
Contrariété de la loi sur l’Influence Commerciale au droit européen
Si l’Union Européenne a pu affirmer qu’elle encourageait l’élaboration de politiques d’instruments visant à encadrer les pratiques des influenceurs, elle ne souhaite cependant pas que cela se fasse au détriment de l’harmonisation des lois nationales et des textes européens en vigueur.
En août 2023, soit deux mois la promulgation de la loi française, la Commission Européenne écrivait au gouvernement français afin de lui indiquer qu’elle considérait que certaines dispositions de la Loi du 9 juin 2023 pouvaient entrer contradiction avec les règles du marché unique de l’UE.
Projet d’ordonnance venant modifier la loi sur l’Influence Commerciale
Dans ce contexte, c’est par voie d’ordonnance que le gouvernement français a entendu clarifier la Loi du 9 juin 2023 vis-à-vis, en particulier, du droit européen.
Le 4 juillet dernier, un projet d’ordonnance de mise en conformité (Draft Order amending Law No 2023-451 of 9 June 2023 aimed at regulating commercial influence and combating abuses of influencers on social networks) a donc été notifié à la Commission européenne, en vue de préciser certaines dispositions de la législation française pour les rendre compatibles aux textes européens.
Les modifications peuvent être résumées comme suit :
- Applicabilité de la loi aux influenceurs :
La définition d’influenceur reste inchangée, mais la loi précise qu’elle s’applique aux influenceurs établis en France ou hors de l’Espace Économique Européen (EEE). Pour les influenceurs établis au sein de l’EEE, un mécanisme de sauvegarde est prévu pour mettre fin à une atteinte ou un risque sérieux et grave d’atteinte à l’ordre public, notamment concernant la protection des mineurs, la sécurité publique, la protection des consommateurs ou la santé publique (article 1).
- Souplesse dans la transparence des intentions commerciales:
Les modalités de transparence concernant l’intention commerciale, comme les collaborations commerciales ou publicités, sont assouplies. Les mentions doivent être adaptées aux caractéristiques de l’activité d’influence et au format du support de communication utilisé (article 5).
- Souplesse dans les critères de mention des contenus:
Les critères d’indication de certaines mentions, telles que les images retouchées, images virtuelles, et les jeux d’argent et de hasard, sont assouplis. Ces mentions doivent être claires, lisibles et compréhensibles sur tout support utilisé, au lieu d’être identifiables sur l’image ou la vidéo durant toute la durée du visionnage (articles 4 et 5).
- Décret sur la représentation légale:
Un décret est prévu pour définir les modalités d’application concernant la représentation légale sur le territoire de l’Union européenne des influenceurs qui ne sont pas établis dans un État membre de l’Union européenne, de la Confédération suisse ou de l’EEE, mais qui ciblent un public en France (article 9).
Reste à savoir si ces modifications suffiront à convaincre les institutions européennes. On peut toutefois être certain que les représentants du gouvernement sauront user de leur influence en la matière ! Affaire à suivre …